Marmottage.
C'est l'hiver. Je passe beaucoup de temps à la maison et j'avoue que je ne m'en plains pas. Les Grands sortent beaucoup, ils partent tôt et rentrent quand il fait déjà nuit, ils disent qu'ils travaillent, mais moi, je ne connais pas la définition de ce mot. Moi, je reste bien au chaud, je squatte mon panier, voire mieux encore, le canapé et les couverture, je roupille une bonne partie de la journée. Le soir, ils pensent me faire plaisir et me traînent dehors, dans les flaques, avec ce vent froid qui soulève mes oreilles et glace mon museau. J'ai beau essayer de leur faire comprendre que je me contenterais volontiers du minimum (un pissou contre les rosiers de la place et une petite crotte au canisite), mais ils insistent pour qu'on marche au moins jusqu'au lycée.
Ce matin, brillante initiative : ils m'ont emmené en forêt. Quelle idée ! Des flaques partout, de la gadoue jusqu'au bidon, et même que ça m'a éclaboussé les babines. Bon, j'ai fait honneur quand même parce que je vois bien qu'ils font des efforts pour moi, alors j'ai fait le chien courageux et fier, j'ai reniflé toutes ces odeurs que je n'ai pas en ville : pipis et crottes de bêtes aux noms exotiques que je n'ai jamais vues mais dont j'imagine l'allure et le pelage : chevreuil, marcassin, lièvre et mammouth (je ne suis pas sur de tout là...). J'ai fait des pissous sur toutes les touffes d'herbe, sur chaque petite branche, autant me rendre utile et laisser trace de mon passage. Mais quel bonheur de revenir ensuite au chaud et de passer l'après-m' enroulé dans une couverture !